mardi 16 février 2021

ALLEMAGNE - Bavière - Les extérieurs du château de Neuschwanstein

Les extérieurs du château de NEUSCHWANSTEIN

La star des châteaux allemands ****


Le château de Neuschwanstein (en allemand: Schloss Neuschwanstein ou "Nouveau Rocher du Cygne") est un palais de style éclectique du XIXe siècle situé sur une colline escarpée au-dessus du village de Hohenschwangau près de Füssen dans le sud-ouest de la Bavière, en Allemagne. Le roi Louis II de Bavière en ordonna la construction.

Au Moyen-âge, trois châteaux dominent les villages du secteur. En 1832, le père de Louis II, le roi Maximilien II de Bavière, achète les ruines du château de Schwanstein afin de les remplacer par un confortable palais néo-gothique connu sous le nom de château de Hohenschwangau. Achevé en 1837, le palais devient la résidence d'été de sa famille et de son fils aîné Louis (né en 1845) qui y passe une grande partie de son enfance. Le château de Vorderhohenschwangau et le château de Hinterhohenschwangau installés sur une colline escarpée surplombent le château de Schwanstein, deux lacs voisins (Alpsee et Schwansee) ainsi que le village. Au XIXe siècle, il ne reste des châteaux médiévaux jumeaux que des ruines, mais celles de Hinterhohenschwangau font alors office de belvédère (Sylphenturm). Lorsque le jeune roi arrive au pouvoir en 1864, la construction d'un nouveau palais à la place des deux châteaux en ruines devient le premier de sa série de projets de constructions. Il nomme le récent projet : nouveau château de Hohenschwangau; ce n'est qu'après sa mort qu'il est rebaptisé Neuschwanstein. Hohenschwangau et Schwanstein changent de noms : le château de Hohenschwangau remplace les ruines du château de Schwanstein et le château de Neuschwanstein occupe l’emplacement des ruines des deux châteaux de Hohenschwangau.



Deux vues de l'environnement du château dans le Sud de la Bavière (deux photos ci-dessus)


La silhouette du château de Neuschwanstein vue depuis la plaine


Un peu d’histoire

Neuschwanstein incarne à la fois la mode architecturale contemporaine connue sous le nom de « romantisme de château » (en allemand: Burgenromantik) et la passion de Louis II pour les opéras de Richard Wagner. Deux voyages effectués par Louis en 1867 - un en mai à la Wartburg reconstruite près d'Eisenach, et un autre en juillet au château de Pierrefonds en Picardie, qu'Eugène Viollet-le-Duc a restauré – l’inspire pour son projet. En février 1868, le grand-père de Louis II, le roi Louis I, meurt, lui transmettant des sommes considérables. Christian Jank conçoit les plans et l'architecte Eduard Riedel en réalise les travaux. Les châteaux en ruines ne sont pas intégrés dans les nouveaux plans. Le palais peut être considéré comme typique de l'architecture du XIXe siècle. Les formes de l'art roman (figures géométriques simples comme les cuboïdes et les arcs en plein cintre), le gothique (lignes pointées vers le haut, les tours minces) ainsi que l'architecture et l'art byzantins (le décor de la salle du trône) se sont mêlés de manière éclectique. La Patrona Bavariae et Saint Georges, au-devant de la cour du Palas (bâtiment principal), sont représentés dans le style local Lüftlmalerei, une technique de fresques typique des maisons d'agriculteurs de l'Allgäu. Le style général du château était sensé être néo-gothique, au final le palais adopte un style roman. Les thèmes empruntés à l'opéra sont progressivement passés de Tannhäuser et Lohengrin à Parsifal.


Le château de Hohenschwangau au pied de Neuschwanstein


Neuschwanstein pointant vers les cieux


Construction

En 1868, les ruines des châteaux jumeaux médiévaux sont complètement démolies. La première pierre du palais est posée le 5 septembre 1869; en 1872 sa cave est achevée et en 1876, le premier étage est terminé. À la fin de 1882, le Palas est achevé et entièrement meublé, permettant à Louis d'y prendre ses appartements de façon provisoire et d'observer les travaux de construction en cours. En 1874, la gestion des travaux de génie civil passe d'Eduard Riedel à Georg von Dollmann. La direction du projet échoit, elle,  à Julius Hofmann, après que Dollmann perd la faveur du roi. Le calcaire blanc utilisé pour les façades provient d'une carrière voisine. Les briques de grès des portails et des baies vitrées proviennent de Schlaitdorf dans le Wurtemberg. Le marbre d'Untersberg, près de Salzbourg, est utilisé pour les fenêtres, les nervures d'arc, les colonnes et les chapiteaux. Le transport des matériaux de construction est facilité par des échafaudages et une grue à vapeur qui soulève les matériaux sur le chantier. Pendant environ deux décennies, le chantier de construction représente le principal employeur de la région. En 1880, environ 200 artisans travaillent sur le site, sans compter les fournisseurs et autres personnes indirectement impliquées dans la construction. Les statistiques des années 1879/1880 rapportent l’utilisation d’une immense quantité de matériaux : 465 tonnes de marbre de Salzbourg, 1550 tonnes de grès, 400 000 briques et 2050 mètres cubes de bois pour l'échafaudage. En 1870, une société est fondée afin d'assurer les ouvriers, à raison d’une faible redevance mensuelle, majorée par le roi. Les bénéficiaires des accidentés perçoivent une petite pension. En 1884, le roi peut s'installer dans le Palas (encore inachevé), et en 1885, il invite sa mère Marie à Neuschwanstein à l'occasion de son 60e anniversaire. En 1886, la structure externe du Palas est en grande partie terminée. La même année, Louis fait remplacer le premier pont Marienbrücke, en bois et situé au-dessus des gorges de Pöllat, par une construction en acier. Malgré sa taille, Neuschwanstein n'a pas d'espace pour la Cour, et n’abrite que les appartements privés du roi et les chambres des domestiques. Les bâtiments de la cour ont vocation à être des décors, plutôt que des pièces résidentielles. Louis II ambitionnait d’honorer la vie et l'œuvre de Richard Wagner, décédé en 1883 (il n’a jamais visité le château). Louis II n’a vécu dans le palais que 172 jours.


La silhouette du château et de ses tours


La guérite d'entrée

Revers de l'entrée, vu de la cour

La cour intérieure, d'Ouest en Est


La façade orientale du Palas


Financement des travaux

Le roi a payé ses projets de construction grâce à ses moyens privés. Les coûts de construction de Neuschwanstein se sont élevés à 6,2 millions de marks (soit 43 millions d'euros environ), près du double du coût estimé initial de 3,2 millions de marks. Le roi ouvrit continuellement de nouvelles lignes de crédit. Même après que ses dettes atteignent 14 millions de marks, il insiste sur la poursuite de ses projets architecturaux; il menace de se suicider si ses biens sont liquidés. En juin 1886, le gouvernement bavarois décide de démettre le roi de ses fonctions. Il vit au château à l'époque qu'il est contraint de quitter. Louis II est placé sous la tutelle du Dr von Gudden. Le 13 juin, tous deux sont trouvés morts dans des circonstances mystérieuses à la surface des eaux peu profondes du lac Starnberg près du château de Berg.


La façade Nord du château


Les tours et tourelles de la façade Nord


La façade occidentale et ses balcons


Après la disparition de Louis II

Au moment de la mort du roi, le palais est loin d'être achevé. Louis II n'a dormi qu'onze nuits au château. Les structures externes de la guérite et du palais sont pour la plupart terminées, mais la tour rectangulaire est encore échafaudée. Le projet d’un donjon de 90 mètres de hauteur dans la cour supérieure, reposant sur une chapelle à trois nefs est finalement abandonné. Les projets d'un jardin avec terrasses et fontaine à l'Ouest du Palas sont également abandonnés après la mort du roi.

Le prince-régent Luitpold ordonne que le château soit ouvert aux visiteurs moyennant finance. Les administrateurs de la succession du roi réussissent à équilibrer les dettes de construction dès 1899. Dès lors, Neuschwanstein devient une source de revenus stable pour la maison de Wittelsbach. Suite à un différend familial, les palais de Louis II, dont Neuschwanstein, tombent aux mains de l'État.




La cascade des gorges de Pöllat, à l'Ouest du château (3 vues ci-dessus)


La Seconde Guerre mondiale

En raison de son isolement géographique, le palais survit aux deux guerres mondiales. Jusqu'en 1944, il sert de dépôt des pillages réalisés par les nazis en territoire occupé (français en particulier). En avril 1945, les SS envisagent de faire sauter le palais afin d’empêcher le bâtiment de tomber aux mains de l'ennemi. Le plan n'est pas mis à exécution.


Architecture générale

Les fondations du donjon (projet abandonné) sont encore visibles dans la cour supérieure. Le château de Neuschwanstein se compose de plusieurs structures individuelles érigées sur une longueur de 150 mètres au sommet d'une crête de la falaise. Le bâtiment, allongé, est agrémenté de nombreuses tours, tourelles ornementales, pignons, balcons, pinacles et sculptures. Suivant le style roman, la plupart des ouvertures de fenêtres sont façonnées en bi- et triforia. Le château est conçu comme l'idéal romantique d'un château de chevalier. Contrairement aux « vrais » châteaux défensifs, Neuschwanstein a été pensé, dès son origine, comme un bâtiment intentionnellement asymétrique et érigé par étapes consécutives. Les attributs typiques d'un château médiéval y ont été inclus, mais les fortifications - la caractéristique la plus importante d'un domaine aristocratique moyenâgeux - en ont été supprimées.





Quatre vues sur le lac Alpsee et le château de Hohenschwangau depuis les balcons de Neuschwanstein


Extérieur

On entre par la guérite de la porte, symétrique et flanquée de deux tours d'escalier. Ses murs extérieurs sont revêtus de briques rouges, les façades côté cour sont en calcaire jaune. La corniche du toit est entourée de pinacles. L'étage supérieur de la guérite est surmonté d'un pignon à gradins. Il abritait le premier logement du roi Louis II. Le rez-de-chaussée de la guérite était destiné à accueillir les écuries. Le passage, couronné des armoiries royales bavaroises, mène directement dans la cour qui comporte deux niveaux. Le niveau inférieur est limité à l'Est par la guérite et au Nord par les fondations de la tour dite "rectangulaire" ainsi que par le bâtiment à galerie. L'extrémité Sud de la cour est ouverte, offrant une vue sur les montagnes environnantes. A son extrémité Ouest, la cour est délimitée par un talus en briques, dont le renflement polygonal en saillie marque le chœur de la chapelle initialement prévue, mais jamais construite. Elle aurait dû former la base du donjon

Une volée de marches, sur le côté, donne accès au niveau supérieurLa structure la plus impressionnante du niveau supérieur de la cour est la « tour rectangulaire » (45 mètres de haut). Comme la plupart des bâtiments de la cour, il n'a qu'une vocation décorative. Sa plate-forme d'observation offre une vaste vue sur les contreforts alpins au Nord. L'extrémité septentrionale de la cour supérieure est limitée par la « maison des chevaliers ». Le bâtiment de trois étages est relié à la tour rectangulaire et à la guérite au moyen d'une galerie continue comportant des arcades aveugles. La tonnelle limite le côté Sud de la cour. L'extrémité Ouest de la cour est délimitée par le Palas (palais). Il constitue le véritable bâtiment principal et résidentiel du château et contient les appartements du roi et les chambres des domestiques. Il s'agit d'une structure colossale de cinq étages qui forme deux énormes cuboïdes reliés par un angle plat et recouverts par deux hauts toits à pignon adjacents. Dans ses angles, se dressent deux tours d'escalier, celle du Nord surmonte le toit du palais de plusieurs étages avec une hauteur de 65 mètres. La façade Ouest du Palas soutient un balcon à deux étages avec vue sur l'Alpsee (lac), tandis que vers le Nord une tour et la véranda font saillies dans la structure principale. L'ensemble du Palas est parsemé de nombreuses cheminées décoratives et tourelles ornementales. Le pignon Est est couronné d'un lion de cuivre, le pignon Ouest (extérieur) par la silhouette d'un chevalier.


Dans la culture

Le château apparaît dans plusieurs films tels que :  "Ludwig II" de Helmut Käutner (1955) et "Ludwig ou le crépuscule des Dieux" de Luchino Visconti (1973), deux biopics consacrés au roi. Il a aussi inspiré le Château de la Belle au Bois Dormant de Disneyland. Depuis 2015, les palais Linderhof, Herrenchiemsee, Neuschwanstein et Hohenschwangau sont sur la liste provisoire allemande pour une future désignation comme sites du patrimoine mondial de l'UNESCO.


Le château noyé dans la forêt



Deux vues classiques du château depuis le pont de la cascade


En bref…

Monument emblématique du romantisme allemand, les touristes se déplacent en masse en Bavière pour le voir, quittes à ne voir que lui… Il s’agit bien sûr d’un incontournable de Bavière et même d’Allemagne ! L'alchimie de l'architecture de conte de fées et de la vie sulfureuse de Louis II contribue grandement au succès du lieu. Veillez à éviter les moments d’affluence autant que possible (vacances, week-ends). Le château de Hohenschwangau se trouve un peu en contrebas de la star des lieux. De nombreuses randonnées sillonnent le secteur, en direction des montagnes bavaroises. Les photos de cet article ont été prises en septembre 2014 et juillet 2020.


Carte satellite du Sud de la Bavière situant Neuschwanstein (source Google)


Accès

-De Munich comptez 1h40 de route pour effectuer les 120 km de trajet par la 95, la 23 puis la 17.

Il est actuellement impossible de stationner près du château. Il faut laisser son véhicule au pied de Hohenschwangau (parking payant...) et prendre une navette jusqu'à Neuschwanstein (10 min environ).

Attention ! Les réservations se font à l’avance sur internet et il est parfois impossible d’acheter des billets sur place pour jour même, bien que les abords du château soient en libre accès en toutes saisons.



Deux vues du château depuis le pont, par temps un peu plus couvert (juillet 2020)


7 commentaires:

  1. Un voyage à Neuschwanstein, c'est une grande bouffée de nostalgie où se mêlent le règne insolite de Louis II, les arts et le cinéma. Merci à notre photographe pour la recherche approfondie et précise concernant la construction du "Nouveau rocher du cygne", les circonstances historiques, tout le concentré de passion qui entoure le projet et sa réalisation, et aussi pour ses sublimes prises de vue.

    Le château le plus célèbre d'Allemagne, le plus visité, le plus romantique, celui qui a inspiré Walt Disney pour "La Belle au bois dormant", réunit les amoureux de la littérature et de la musique, et le grand film de Luchino Visconti "Ludwig ou le Crépuscule des Dieux" sorti en 1973 nous a pour toujours envoutés, emportant dans son sillage la grande musique de Wagner, ses opéras qui faisaient vibrer Louis II, Tannhäuser, Lohengrin et Parsifal en écho au château de conte de fées. On épouse le rêve d'un roi excentrique et phobique social, solitaire et bâtisseur.

    Ce château flamboyant est abordé par notre photographe dans toutes ses dimensions, par toutes ces façades, "noyé dans la forêt", comme il le dit si joliment, cette forêt bavaroise où Louis II et Sissi chevauchaient côte à côte, et où les tavernes cachées abritaient les amours du roi pour les beaux garçons. La forêt est importante dans la littérature allemande, elle est dans le cœur de Louis II. La cascade et le lac Alpsee ajoutent au charme irrésistible de ce lieu chargé d'amour et de folie. Un château étonnant dans un cadre typiquement germanique, et tant de souffrances aussi.

    Il me semble que même si nous ignorions tout de ce roi fou, nous penserions que ce château comme surgi d'une fable, unique et pointant vers le ciel, est l’œuvre d'un magicien. Neuschwanstein fait corps avec la montagne et porte bien son nom allemand de "Rocher du cygne".

    Louis II avait conscience de l'extravagance de son projet : "Oh, il est nécessaire de se construire de tels paradis, de tels lieux de refuges poétiques où l’on puisse oublier, pendant quelques temps, l’époque épouvantable où nous vivons". Une vision personnelle pour honorer Richard Wagner...
    Maintenant nous nous approprions, chacun à notre façon, cet héritage romantique. La splendeur des photographies isole le château de toutes les nuisances touristiques et autres, ne servant que l'enchantement.
    Merci Julien.



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    1. Merci Nadine pour ce vibrant hommage à Ludwig Zwei und sein Schloss !
      J'ai corrigé quelques coquilles...

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  2. Eh bien, si on ne connaissait pas l'histoire du château, maintenant on la connait ! Quel édifice (je parle de l'article bien entendu) ! A la mesure de son auteur ! Toujours intéressant de découvrir ou redécouvrir ce château imposant.

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  3. c'est bien propre ! A l'image de Deutschland über alles

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  4. Superbe article !
    Essai d'envoi de commentaire aussi je fais bref :)

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